La Putain et la Vierge ...

L'une se pare de poudre de riz dans un nuage amandé au milieu d'une chambre aux meubles sculptés et aux lourds rideaux de velours, tandis que l'autre mastique une capsule de cardamome en lissant sa jupe coupée au dessus du genou, observant du coin de l’œil le jeune passant qui éveille en elle quelques frissons...

L'une caresse la peau pâle de sa cuisse légère aux odeurs charnelles, tandis que l'autre ajuste sa robe aux dentelles fines encadrant un décolleté faussement sage, où brille, fièrement, un bijou qui semble tenir en apesanteur au dessus du précipice où s'attardent les regards des gentilshommes...

L'une doit soigner l'image que l'on veut lui donner, l'image tant fantasmée ; l'autre se repose sur sa réputation, son nom qui lui donne ses libertés...

Corps laiteux, livide, fleur parmi les fleurs, l'une disperse des odeurs sales, animales, d'une peau trempée de sueur, échauffée par une nuit de péchés où son corps s'est livré encore, à de nouvelles sensations peu sages. On l'avait prévenue pourtant, qu'en pénétrant ce champ planté de fleurs du diable, elle laisserait son âme s'enivrer par le parfum narcotique et érotique, offrant son esprit aux démons du sexe.

L'autre, qui transporte l'odeur d'une fleur blanche innocente, est blanche, aux lèvres juteuses parées de pourpre auxquelles s'accrocheraient volontiers certains cœurs égarés, qui, comme selon leurs volontés, leurs offriraient le temps d'une nuit une couche encore inviolée, illusion d'un amour sans faille, premiers doigts à découvrir la mousseline sous les plis du corset de cuir souple...

L'une a la peau de cuir, tandis que de cuir l'autre couvre sa peau...

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