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Comme une envie d'aldéhydes ...

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Depuis quelques temps, j'ai des envies de parfums aldéhydés, et encore plus : de floraux aldéhydés !
Peut être à cause du temps automnal, ou d'autres dénonceraient peut être mon "envie de jouer les dames du monde, grandes bourgeoises, dans ma toute nouvelle ville d'accueil et pas des moindres : Paris !" (Thierry, spéciale dédicace !)

Quoiqu'il en soit, les parfums aldéhydés et moi, c'était plutôt mal parti !

Je n'arrivais pas à savoir à quoi ressemblait, au nez, un aldéhyde.
Oui, le N°5 de Chanel, premier parfum à les avoir utilisés, en regorge, tout comme Calèche ou d'autres. Mais alors que j'étais dans ma période "je veux décortiquer bêtement chaque parfum et savoir ce que chaque chose sent", je m'arrachais les cheveux sur cette famille olfactive que l'on qualifie de "classique". Je reniflais sans cesse Baghari, de Robert Piguet, pour lui soutirer des informations, je passais au crible (ou plutôt, au nez !) Arpège, de Lanvin.

Marilyn et son N°5

Puis le déclic s'est imposé, de lui même, évident, en un parfum un peu moins connu mais pour lequel j'ai littéralement craqué dès que je l'ai senti : Liu, un Guerlain datant de 1929, maintenant passé dans la collection exclusive des "Parisiennes".
Je me demande encore maintenant comment j'ai fait pour passer à côté des aldéhydes, à côté d'une telle puissance, d'une telle diffusion, d'un tel OVNI de la parfumerie !

Des aldéhydes, au sens "matière-première" du terme, il en existe plusieurs, et qui ne sont pas forcément des aldéhydes chimiquement parlant (mais ça, c'est trop ennuyant, on va occulter la chimie !). Sentis seuls, leurs odeurs sont, pour certains, plutôt désagréables, voir même insupportables et à la limite d'un souffle thermonucléaire (qui vous laissent le regard hagard et les cheveux brûlés et droits sur la tête) : notes de fer chauffé à blanc, d'électricité statique, savonneux, aux relents d'agrumes, de vestiaires de piscine, de glace, d'autres aux accents de fraise, ou bien de pêche, de noix de coco et de pierre chauffée au soleil, et même certains sentent le concombre, mais puissance x1000 !!!

TOUS donnent aux compositions de la diffusion et un certain volume qui s'impose de lui-même, et surtout, un caractère indéniable qui s'affirme dès la tête et persiste parfois jusqu'au fond du parfum.


Petit tour de parfums aldéhydés variés qui me tiennent à cœur :


Liu

Les classiques de Guerlain ne sont pas des aldéhydés, et pour cause: Jicky, l'Heure Bleue et Mitsouko sont tous nés avant le N°5, et suite au succès de la création d'Ernest Beaux pour Chanel, Jacques Guerlain, sort pour sa maison un floral aldéhydé, comme bien sûr beaucoup d'autres marques. Bien sûr, il n'arrivera pas à détrôner son confrère et modèle de chez Chanel, et sera quelque peu oublié. Et à tort ! Il n'a rien à envier au N°5, même si la filiation est évidente.
Au lieu d'un jasmin, on retrouve un bouquet typiquement Guerlain, fait de rose, de jasmin, d'ylang, de néroli et surtout d'iris qui, associé à une base boisée de santal, et vanillée, assoit le parfum sur un coussin moelleux et confortable, avec une note amandée que je trouve évidente.


Calèche

Hermès décide, pour lancer son tout premier parfum, de jouer la sécurité et d'aller du côté de quelque chose qui plait. Quarante ans après le précurseur, qui est toujours la référence, la maison choisit, évidemment, le floral aldéhydé. Et c'est ainsi que naquit Calèche !
Jouant moins sur les fleurs que les autres, il exacerbe plutôt la facette hespéridée des aldéhydes, aux notes d'orange et de mandarine, mettant également à l'honneur le citron et la bergamote en tête. Le coeur est beaucoup moins suave et floral que dans Liu ou le N°5, même si percent quelques fleurs au milieux des agrumes qui s'accrochent et persistent très longtemps, grâce à la magie de nos fameux aldéhydes !

Je qualifierais Calèche de "l'aldéhydé le moins féminin" ; peut être à cause du côté hespéridé mis en avant au détriment de sa facette florale mise au second plan, comme je le disais, et peut être aussi à cause de son caractère plus froid, distant et hautin, qui en découle de part la froideur des aldéhydes et des agrumes. Peut être aussi que le fond nettement boisé le rend plus facilement associable au sillage d'un homme qu'un N°5 ou un Ma Griffe ! Mais je n'irais pas jusqu'à dire que c'est un "aldéhydé masculin".


Ma Griffe

Ma Griffe de Carven est classé dans les Chyprés floraux aldéhydés. Une appellation bien barbare, me direz-vous, pour un parfum qui me renvoie l'image d'un col de fourrure de lapin blanc, qui effleure le cou à la peau laiteuse et tiède d'une femme se promenant sous la neige.
Car oui, par la magie des aldéhydes, on arrive à donner à un parfum à la fois la note de chaud et la note de froid. Le départ de Ma Griffe est vert l'espace de quelque seconde, laissant deviner une touche de galbanum, puis se poudre et se fleurit pour laisser la place à un cœur moelleux, crémeux et rond, et franchement plus "orientlisant" que de nombreux autres de ses cousins, grâce à un fond exacerbé fait de labdanum, de mousse de chêne et de styrax.
Ce parfum me fascine par son effet tactile, sa rondeur et son épaisseur presque palpable. Mais ce qui me fascine le plus, je crois, c'est qu'il fut créé par Jean Carles (Miss Dior, Tabu, Schoking, Visa ...) vers la fin de sa carrière, alors qu'il était devenu complètement anosmique. Encore une preuve de son génie !


La Myrrhe

Serge Lutens, en 1995, surprend grâce à l'interprétation et la sublimation qu'il fait de cette résine sacrée qu'est la myrrhe. Il surprend d'autant plus qu'il choisit, pour cela, d'utiliser les aldéhydes, matière que l'on aurait pu qualifier à l'époque de "désuète", alors que le succès d'Angel ne faisait que de s'amplifier, amorçant le virage de la parfumerie vers les gourmands. Mais Serge Lutens est toujours à contre courant, pour le plus grand plaisir de ses admirateurs et des connaisseurs. Ainsi, La Myrrhe s'ouvre sur un départ tonitruant de mandarine et une bonne dose d'aldéhyde C12, qui vont amplifier la facette naturellement anisée et réglissée de la résine ; ce que je trouve extrêmement bien réussi, même si, paradoxalement, c'est ce qui me donne un mal de crâne épouvantable dans la myrrhe naturelle.
C'est ce que Serge Lutens demandera encore à Christopher Sheldrake trois ans plus tard, pour la facette camphrée de la tubéreuse, poussée à l'extrême dans Tubéreuse Criminelle.
La Myrrhe diffère de bien d'autres compositions à partir d'aldéhydes car elle ne comporte pas d'accord "floral" qui leurs sont généralement associés, comme dans les parfums précédents. Écriture moderne s'il en est, donc, avec des inspirations orientalisantes et classiques... typiquement Lutens !



A vous de me citer, à présent, les parfums aldéhydés que vous préférez !


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